L’erreur dans les contes de Maupassant
Abstract
Nombreux sont les contes de Maupassant relatant une histoire qui a pour principal ressort une méprise, une illusion, un paralogisme, une appréciation fausse dont les suites sont tantôt tragiques, tantôt burlesques et, de temps à autre, les deux à la fois. L’erreur, sous toutes ses formes, et surtout l’erreur aux conséquences incalculables, disproportionnées et, pour cette raison même, effrayantes, tient une place singulière dans le sombre univers de cet écrivain dont l’imagination semble aimantée par les catastrophes de la vie quotidienne. La présente étude montre que réalisme de Maupassant ne joue pas seulement contre le romanesque du rêve et de l’illusion en brodant inlassablement sur le thème de l’erreur humaine. Sa force tient à ce qu’il est infiniment plus radical : il propose du réel une représentation résistant à toute modélisation logique ou rhétorique, échappant à toute conformité aux « documents humains » dont se repaît la vraisemblance naturaliste. En montrant comment l’homme, dans ses rationalisations comme dans ses rêves, se trompe le plus souvent, Maupassant définit une esthétique narrative : rien n’est sûr dans la réalité, même pas le pire, qui est pourtant le plus fréquent. L’erreur, c’est toujours peu ou prou de ne pas voir, de ne pas comprendre que le réel, dans sa diversité irréductible, n’est fait que de particularités, d’exceptions et de raretés, qui ont raison de toute prétention logique à atteindre sa vérité.